Souvent assimilée à une accumulation de déchets sur la plage, la laisse de mer est en fait un écosystème fragile à préserver !
Sa mauvaise réputation vient du fait qu’on peut y trouver parmi les éléments naturels du plastique, papier, pneus, et bien d’autres déchets qui n’ont rien à y faire, découvrez sur cette autre page comment bien les ramasser ! Il peut y avoir parfois aussi une accumulation massive d’algues qui n’a pas grand chose de naturel, et qui entraîne des odeurs désagréables et des dégagement de gaz de fermentation qui peuvent même être dangereux pour la santé…
Mais revenons à la laisse de mer naturelle, elle est composée principalement de débris d’algues, de coquillages, de bois mais aussi d' »os » de seiche, de plumes, de carapaces de crustacés, etc… Ces éléments vont se déposer à la limite des marées hautes, formants des lignes parallèles à la côte en fonction des hauteurs de marée, qui fluctuent suivant le coefficient de marée.
Ces laisses de mer sont un véritable écosystème, ce sont elles qui rendent la plage « vivante » ! Toute cette matière organique qui se dépose va « enclencher » la chaîne alimentaire de la plage. Des petits crustacés,comme les puces de mer (de leur vrai nom les talitres) mais également des insectes, vont consommer ces restes naturels et entamer leur dégradation. De petits prédateurs,comme des bécasseaux, ou des poissons à marée haute, vont venir consommer ces « décomposeurs » et à leur tour, ils alimenterons des prédateurs plus gros dans la chaîne alimentaire. Sans la laisse de mer, base de cette chaîne, point de vie sur la plage !
Cette ressource alimentaire est extrêmement importante pour bon nombre d’oiseaux, qui vont y trouver de l’énergie lors de leur migration ou pour nourrir leurs jeunes. Un oiseau bien connu, mais aujourd’hui très rare, est le gravelot à collier interrompu. Il y dissimule son nid, une simple dépression creusée dans le sable, et il y trouve toute la nourriture nécessaire pour lui et pour élever ses poussins !
Mais la plage n’est pas le seul écosystème qui va bénéficier de la laisse de mer ! En dégradant les matières accumulées en fines particules, les talitres et autres détritivores vont favoriser une intégration de la matière organique dans le sable ou les graviers, qui vont permettre aux plantes du haut de la plage d’y trouver tous les éléments pour se développer, ainsi que les plantes de toute la dune où ces particules y seront amenées par le vent. Sans cette lente dégradation sur la plage et à cet apport dans la dune, les oyats, panicauts, liserons, etc… ne pourront avoir les substances nutritives nécessaires à leur bon développement, et c’est toute la stabilité de la dune qui est alors menacée, se rajoutant aux autres menaces comme les tempêtes à répétition, la montée du niveau des mers, etc… !
La laisse de mer a également une action immédiate sur la stabilité de la plage. Quand le vent souffle, les grains de sable vont commencer à se déplacer à partir d’une certaine vitesse, et sans obstacle, ils peuvent partir loin et « amaigrir » la plage. Grâce aux différents éléments de la laisse de mer, du simple coquillage au gros tronc d’arbre échoué, le sable va être retenu par ces obstacles ou se déposer juste en arrière par un phénomène de brise vent, ce qui va permettre à la plage de se maintenir. De la même façon, les différents éléments de la laisse de mer jouent un rôle de cohésion pour le sable lors des fortes houles ou des tempêtes, formant une protection en avant de la dune qui subit une moindre attaque.
Depuis plusieurs dizaines d’années, nous avons pris l’habitude de voir des plages « propres », nettoyées souvent mécaniquement par des tracteurs équipés de cribleuses qui vont collecter bien sûr la pollution mais également toute la laisse de mer naturelle. Ce système va parfois émietter le plastique « vieilli » par les UV au lieu de le collecter, et produire des quantités importantes de déchets, mélange de pollution, d’algues et de sable difficiles et onéreuses à éliminer… Alors changeons de regard, et lors de vos balades, de vos séances de farniente sur la plage, ne regardez plus cette laisse de mer comme une nuisance, et encouragez les collectivités pour une gestion douce de la laisse de mer, par des opérations mécaniques réduites et ciblées et en privilégiant un nettoyage manuel et sélectif de la vraie pollution !
Dans une forêt, une prairie, les feuilles mortes, les sauterelles, les grillons,… sont une partie intégrante du plaisir que nous avons à nous immerger dans la nature, sur la plage, considérons les algues, coquillages, talitres… de la même manière pour retrouver une plage vivante !